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princesses de science

femme, qu’Herlinge lui-même demeurait perplexe, tant est délicate et infirme l’investigation du médecin dans les altérations organiques du cœur !

Le premier cas et le dernier surtout passionnaient Thérèse. Le matin, après la visite, elle revenait au lit de la malade, son stéthoscope à la main. Silencieuse, elle la découvrait d’un geste, échancrait la chemise, mettait à nu la poitrine où les seins déformés ne faisaient plus que deux plis de chair molle ; elle repoussait le gauche du doigt, et appliquait sur le thorax blanc le disque noir de son appareil. Des minutes entières, l’oreille appliquée à l’orifice du stéthoscope, elle auscultait minutieusement. Sur la table centrale, les externes, qui analysaient des urines, plaisantaient entre eux. La religieuse gourmandait l’infirmière. L’élève pharmacien parcourait la salle, de lit en lit, pour la vérification de ses fiches. La novice arrivait à son tour, poussant devant elle la table roulante qui portait les assiettes et la soupière de bouillon, avec un monceau de viande de cheval écrasée… Et Thérèse s’obstinait à percevoir les souffles contradictoires de ce cœur mystérieux, ravagé, déformé, affolant la circulation par ses incohérences d’organe à demi détruit qui vit encore. L’après-midi, à la contre-visite, elle revenait au lit de la vieille, s’acharnant à palper, à ausculter, à percuter. La pauvre femme laissait parfois échapper un soupir d’humeur et de lassitude. Thérèse posait le stéthoscope sur la cinquième côte gauche, y collait